Jour 2: A la recherche des masses d’oeuf dans un monde parallèle
Premier jour sur le terrain : Déboussolant ! Cette immensité que le Grand Nord, ce travail d’échantillonnage quelque peu déroutant et ces révélations sur le réchauffement climatique, le point de non retour… Pas facile de rester connecté ! Découvrez maintenant les détails de cette journée bien complète.
Ce matin, rendez-vous au réfectoire à 7h. La cuisinière et aide volontaire nous ont préparé de délicieuses spécialités pour le petit déjeuner. Un buffet très complet, tel un brunch, des œufs, du lards, des céréales, des gâteaux, du fromage blanc, fruits secs, fruits, jus, thé, gruau… Le gruau, je ne sais pas si ça vous parle, j’avais déjà entendu parlé de cela, même goûté, mais je ne m’en rappelais plus. En fait c’est de l’avoine trempée dans de l’eau toute la nuit, qui ressemble donc à une masse blanche translucide à laquelle on ajoute du sucre, des raisins secs et de la noix de coco par exemple. Avec ça nous étions parés pour notre journée !
Consignes, préparation et c’est parti !
8h rendez-vous en salle pour l’explication du déroulement de la journée. Nous partons à la recherche de masse d’œuf de grenouilles (Activité 1). Nous allons les compter. Les chercheurs suivent leur évolution d’année en année pour comprendre leur comportement. Il s’agit de deux types de grenouille bien précis: les « Reinettes faux-grillons boréal » et les « Grenouilles des bois« , les chercheurs nous les présentent et nous expliquent comment les différencier. Aussi très important ils nous montrent à quoi ressemble une masse d’œuf de grenouilles et où les trouver. Dernière indication: amener plusieurs couches de vêtement, le temps peut changer très vite ici.
8h30 on se retrouve au vestiaire où on enfile notre équipement qui va nous tenir à l’abri du froid et de l’humidité: pantalon et bottes néoprènes, gants et nos diverses épaisseurs de pulls et gilets !! Nous montons dans le bus accompagnés des chercheurs du CNSC. Nous arrivons sur notre première mare. Nous sommes organisés en binômes. Le premier binôme scrute les masses d’œufs; le second vérifie derrière le premier.
Pourquoi compter les masses d’œuf de grenouilles ?
L’objectif de l’étude n°1 vise à analyser s’il y a des différences au niveau de la quantité de masses d’œuf de grenouilles en fonction de la latitude et surtout les évolutions dans le temps. Comme nous sommes à la limite entre l’arctique (banquise) et les terres « continentales », si on remarque des évolutions, cela pourrait révéler des preuves et conséquences du réchauffement climatique. C’est pour cela que les scientifiques vont étudier sur 5 à 30 ans les évolutions de ces masses d’œuf de grenouilles suivant leur latitude (proche de la mer ou plus dans les terres) et voir s’il y a des corrélations ou non. Cela permettra aussi aux scientifiques de voir comment ces animaux s’adaptent, ou évoluent avec le réchauffement climatique.
Nos premiers pas hors du temps
Après avoir scruté patiemment notre première mare binôme après binôme, on est revenus bredouille. D’ailleurs nous ne savions plus trop ce que nous recherchions. Nous reprenons le bus, direction une autre mare.
Absorbée par nos avancées scientifiques j’ai oublié de vous faire part de la beauté des lieux et de nos ressentis. Cette première sortie était vraiment très agréable. L’horizon est plan, nous avançons sur des anciennes routes militaires ouvertes à l’époque de la guerre froide. Nous sommes cernés par la toundra et ses mares d’eau, c’est très beau, grandiose, calme et frais… Nous pouvons apercevoir un squelette de bateau échoué dans les années 50, démantelé de son contenu, il s’appelle l’ITHACA, il est juste superbe. Ce squelette, cet horizon si plan… si vide… ce calme… tout converge à nous sentir hors du temps. S’ajoute à cela nos recherches lentes et minutieuses de masse d’œuf que nous n’avons jamais vu, que nous ne trouvons pas… Où sommes nous arrivés ? Nous n’avons plus de repère… Notre travail a un petit côté absurde, une sorte de recherche sans fin de chose qui n’existe pas… On est un peu déboussolés.
Seconde mare, première trouvaille !
Nous sommes répartis à nouveau par groupe, cette fois la mare est très grande, deux binômes partent d’un sens et deux autres de l’autre. Après quelques mètres, nous entendons que l’autre équipe à trouver une masse d’œuf, nous sommes rassurés. Nous continuons notre recherche, mais rentrons bredouille ! Nous allons donc voir la trouvaille de nos collègues afin de bien identifier ce que nous cherchons. Cette masse d’œuf est très petite, je cherchais quelque chose de plus imposant. C’est maintenant plus clair. Pour ceux qui ont déjà vu des masses d’œufs de grenouille en France, les nôtres sont souvent plus grosses. Ici elles ne sont guère plus grosses qu’un poing fermé. Nous nous dirigeons vers une autre mare à pied, on se répartit. Et cette fois, nous trouvons quelques masses d’œuf également ! Quel bonheur ! Nous réalisons la difficulté de la recherche scientifique, et ce n’est que le premier jour !!
Petite surprise
Alors que nous arpentions les bords de la mare par binôme, Zsuzsanna a fait une découverte. Au milieu des magnifiques couleurs de la toundra, Zsuzsanna a découvert un autre type de masses d’œuf, un magnifique nid recouvert de duvet blanc avec en son centre de grands œufs blancs. Une merveille. Un peu comme un mirage, j’avais peur qu’il disparaisse d’une seconde à l’autre tellement sa beauté paraissait éphémère. Nous les avons identifiés comme des œufs d’outardes, une oie canadienne
L’immensité de la banquise
Encore tout émerveillé par les lieux, nous demandons à nous approcher de la banquise. Dr LeeAnn accepte, part en éclairage vérifier qu’aucun ours polaire rebelle ne traîne dans les parages et nous fait signe d’avancer. En fait la banquise a fondue, c’est l’été, il ne reste que la côte qui est gelée sur une forte épaisseur. Mais c’est déjà très impressionnant. Quand nous apercevons cette forte épaisseur de glace qui borde la côte, à la fois elle nous paraît toute petite, à la fois si immense. L’atmosphère est emplie d’une fraîcheur, et encore une fois je ressens cette sensation d’être « hors du temps ». Seuls quelques oiseaux nous ramènent à la réalité par leur chant ou leur vol. Cet horizon sans fin qui se profile devant nous c’est la mer. On discerne un léger filet blanc tout tout au loin. Ce petit filet blanc si lointain qui dessine la limite entre la mer et le ciel sur toute sa largeur, c’est la banquise ! Je ressens alors une sensation d’immensité. J’imagine comment ce petit filet si loin si étendue doit être juste immense quand on est auprès. Une épaisse couche de glace blanche qui se répand sur des milliers de kilomètres. Un horizon d’un blanc illimité ! Un frisson de froid me parcourt le dos. C’est dingue !
Je vous invite à regarder des vidéos des expéditions de Jean-Louis Etienne en Arctique pour vous rendre compte de cette immensité absolument dingue. Plus d’information sur son site, mais vous trouverez sûrement des DVD dans votre médiathèque.
Pause déjeuner
Nous rentrons manger au centre suivant un petit rituel qu’on retrouvera tous les midis. Nous ôtons notre équipement thermique, les pantalons, les bottes et leurs scotchs. Nous les accrochons pour les retrouver après manger. Le repas est délicieux, la cuisinière ne fait que nous étonner. Des recettes absolument étonnantes pour l’esprit et les papilles. On se revigore et on repart. Rendez-vous au vestiaire pour la session équipement: les pantalons, les bottes, les scotchs et les multiples couches, et c’est parti !
C’est reparti et cette fois avec le vent !
L’après-midi le vent souffle. Comme nous l’a dit LeeAnn ce matin, le temps change rapidement. Il fait maintenant assez frais, nous mettons les bonnets, les capuches pour nous protéger de ce vent froid désagréable. Et nous reprenons nos recherches. Nos pantalons et bottes sont absolument géniaux ! Nous avons les pieds dans l’eau et nous ne sentons pas un semblant d’humidité, pas de froid, ils sont vraiment très confortables, les semelles sont épaisses. C’est le luxe ! Sur la journée, je pense que nous avons dû marquer une dizaine de masses d’œuf avec nos piques en bois. Notre journée n’a pas été très fructueuse. Mais les scientifiques nous rassurent, l’objectif ce n’est pas d’en trouver le plus possible, c’est juste de constater s’il y a en a des nouvelles et les compter.
Echanges sur la situation environnementale
Milieu d’après-midi nous rentrons pour travailler en salle. Nous nous retrouvons pour échanger sur ce que nous avons appris grâce à notre cahier d’apprentissage. Avant de venir nous avons dû suivre un cahier d’apprentissage réalisé par l’excellent organisme Earthwatch. Ce cahier superbement complet et didactique nous a fait réfléchir à travers différentes questions et exercices autour de trois parties:
- La planète
- Mon entreprise (international et local)
- et moi
Ce que nous avons appris sur la planète, l’environnement, les ressources, ce qui nous a fait réagir… C’est une session très intéressante, où on découvre plein de choses que je vous retrouvez en partie dans le Guide de l’Ambassadeur et dans des articles dédiés où je reprendrai les exercices qui nous a été donné de préparer.
Prise de conscience
Pour terminer la journée, nous avons eu une conférence avec Dr Lee Ann Fishback, la responsable du pôle recherche scientifique du CNSC. Une conférence extrêmement « accessible » basée sur des faits et explications simples qui nous a permis de réaliser la situation du changement climatique et les enjeux. Cette fois je suis convaincue :
La planète se réchauffe de manière anormale et extrêmement rapidement. Il faut agir avant qu’il ne soit trop tard.
Comme je l’explique dans l’onglet « MA MISSION« , j’ai toujours pensé que cette notion de « réchauffement climatique » était plus politique et médiatique que réelle. Aujourd’hui j’ai la preuve scientifique par des scientifiques que ce n’est pas du pipo et qu’il nous faut agir vite.
La conférence a traité de manière très accessible de la planète, notre empreinte écologique, l’accélération exponentielle, le jour de dépassement, les ressources et les éco-systemes, la croissance de concentration de CO2, le gaz à effet de serre, la perturbation des cycles et l’augmentation de la température sur terre, le réchauffement au niveau planétaire, ses conséquences sur l’éco-système, l’évolution de la banquise, les catastrophes naturelles, la COP21, le budget carbone, de l’économie circulaire à l’économie linéaire. Tout ceci en 2 ou 3h max. D’une grande simplicité. C’est-ce que je vais tenter de vous retranscrire aussi à travers ce blog, mais surtout ce que je vous raconte dans le Guide de l’Ambassadeur Environnement. Je vous envoie ce guide sur simple demande, remplissez le formulaire à droite et je vous l’envoie dans votre boîte email.
Travail du soir: avis aux blogueurs
Enfin nous sommes libres, il est 20h. Les blogueurs doivent s’affairer. Tous les jours 2 binômes de blogueurs rédigent la journée, qui sera diffusée en français et en anglais sur notre blog Canada : Chruchill Northern Studies Center – June 12-18 – Alcoa Earthwatch 2016. Vous pouvez également lire les articles de deux autres équipes parties cette année soutenir deux autres centres de recherches scientifiques:
- Hong Kong: Subtropical Wetlands and Forests – July 9-15 en chinois et anglais, en soutien à la Chinese University of Hong Kong
- United Kingdom: Wytham Woods – August 14-20 en anglais uniquement, en soutien à Earthwatch et University of Oxford
Ainsi que les équipes des années précédentes dans archives du blog ou dans les archives sur l’ancien site Alcoa Inc.. J’espère que ces articles vont rester en ligne malgré la séparation du groupe. Sur le blog, vous pouvez changer l’année dans l’URL pour accéder à des années antérieures.
Petit mot de la fin
Le temps passe si vite… Dès qu’une activité est terminée, une autre recommence. Vraiment pas le temps de se tourner les pouces. Nous ressortirons d’ici très épuisés, mais au comment transformés.
Pour terminer, nous sentons que la chimie d’équipe est tranquillement en train de prendre place. Rires et plaisirs furent palpables à tout moment de la journée. Nous avons même eu la chance d’observer une bataille de boule de neige entre canadiens et brésilien.
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